Michel Barnier à Matignon : quels sont les dossiers socio-économiques qui attendent le futur gouvernement ?
Budget, déficit, retraites, assurance-chômage, logement... Le futur gouvernement de Michel Barnier, qui sera dévoilé "la semaine prochaine", comme l'a assuré le nouveau Premier ministre en déplacement mercredi 11 septembre à Reims (Marne), devra rapidement s'atteler à plusieurs dossiers, dont certains sans attendre, tel que le budget.
Le projet de loi de finances doit en effet être présenté le 1er octobre à l'Assemblée. La rentrée parlementaire devrait aussi être marquée par les discussions autour de la réforme de retraites, dont le Nouveau Front populaire (NFP) comme le Rassemblement national (RN) souhaitent l'abrogation. Franceinfo recense les dossiers épineux qui attendent le gouvernement Barnier.
Boucler le budget 2025
A peine nommés, les ministres de l'Economie et des Comptes publics devront s'atteler à boucler l'épineux budget 2025, dont l'examen au Parlement doit débuter au plus tard au 1er octobre, pour une promulgation au 1er janvier suivant. D'ici là, le projet de loi de finances doit être transmis au Conseil d'Etat et au Haut Conseil des finances publiques. Devant la commission des finances de l'Assemblée nationale, le ministre démissionnaire de l'Economie, Bruno Le Maire, avait affirmé être "dans les délais" pour un début d'examen au 1er octobre.
Les lettres plafonds, qui déterminent les effectifs et les moyens alloués à chaque ministère, avaient été envoyées aux différents ministères fin août. Le Premier ministre démissionnaire, Gabriel Attal, avait à l'époque validé un budget stable de 492 milliards d'euros pour l'année 2025, avec une hausse des crédits de la Défense et dix milliards d'euros d'économies, notamment sur l'emploi et sur l'apprentissage. Reste désormais à savoir si Michel Barnier reprendra cette copie ou la modifiera.
Maîtriser le déficit des comptes publics
Le déficit des comptes publics, qui a atteint 5,5% du produit intérieur brut (PIB) en 2023 selon l'Insee, pourrait encore se dégrader. Dans une lettre transmise aux parlementaires début septembre et consultée par franceinfo, Bruno Le Maire prévient qu'il pourrait atteindre 5,6% du PIB en 2024, au lieu des 5,1% espérés. Il se creuserait même à 6,2% du PIB en 2025 au lieu de 4,1%, si 60 milliards d'euros d'économies n'étaient pas réalisés l'année prochaine, selon Bercy.
Alors qu'elle est visée depuis fin juillet par une procédure européenne pour déficit excessif, la France discute avec la Commission européenne d'une nouvelle date pour l'envoi de son plan budgétaire pluriannuel. Face à la situation, Michel Barnier ne "s'interdit pas plus de justice fiscale". "Je vais m'efforcer, avec les différents ministres qui seront nommés, de mieux maîtriser, de mieux utiliser l'argent public", a-t-il dit lors de sa première interview sur TF1 vendredi 6 septembre, affirmant qu'il "y en a marre de faire des chèques en blanc sur les générations futures, à propos de l'écologie comme à propos des finances publiques".
Ouvrir le débat sur la réforme des retraites
La réforme des retraites, qui prévoit un relèvement progressif de l'âge de départ à 64 ans au lieu de 62 ans, risque également d'animer les premières semaines parlementaires. Son abrogation est réclamée par de nombreux députés et syndicats. Le RN a ainsi prévu d'utiliser sa niche parlementaire, le 31 octobre, pour l'abroger. Si la gauche n'a pas dit si elle voterait un texte proposé par le RN, le NFP et ses 193 députés avaient fait de l'abrogation de la loi l'un des thèmes phares de la campagne des législatives. Et La France insoumise a déposé un texte en ce sens pendant l'été.
Michel Barnier a dit vouloir "ouvrir le débat" pour une "amélioration" de la réforme. Sans pour autant "tout remettre en cause". "Je veux engager sur ce sujet une amélioration, mais en respectant le cadre budgétaire", a expliqué lors de sa première interview le nouveau locataire de Matignon, qui était partisan d'un report de l'âge légal à 65 ans lorsqu'il était candidat à la primaire des Républicains, en 2021. Dans cet épineux dossier, Michel Barnier devra aussi faire avec les macronistes, qui refusent tout retour en arrière.
Décider de l'avenir de la réforme de l'assurance-chômage
Au soir du premier tour des élections législatives, l'ex-Premier ministre Gabriel Attal avait décidé de suspendre la réforme controversée de l'assurance-chômage. Le texte, qui devait entrer en vigueur le 1er décembre, prévoyait de réduire la durée maximale d'indemnisation de dix-huit à quinze mois pour les personnes âgées de moins de 57 ans, tout en allongeant le temps de travail nécessaire pour y avoir droit (huit mois sur les vingt derniers, contre six mois sur vingt-quatre actuellement).
Alors que les règles actuelles ont été prolongées par décret jusqu'au 31 octobre, qu'en sera-t-il ensuite ? Il reviendra au prochain gouvernement de décider des règles à compter du 1er novembre. En reprenant la réforme actuelle ou en ouvrant des négociations avec les partenaires sociaux pour fixer une nouvelle formule.
Améliorer l'accès aux services publics
Lors de sa passation de pouvoir avec Gabriel Attal, Michel Barnier a érigé plusieurs priorités, dont "l'accès aux services publics". Une thématique qu'il a de nouveau évoquée le lendemain, lors de sa première interview, évoquant "un besoin immense dans les quartiers urbains, mais dans les campagnes aussi". Des mots qui font écho aux grandes lignes du "pacte législatif" présenté par son parti, Les Républicains, en juillet.
Le Premier ministre a effectué son premier déplacement à l'hôpital Necker, à Paris, samedi 7 septembre. S'il a évoqué "des économies à faire" dans le secteur de la santé, le Premier ministre a aussi souhaité "que des progrès rapides soient visibles dans les campagnes, dans l'offre de soins (...) en même temps qu'on continuera à s'occuper de mieux faire fonctionner l'hôpital, avec les personnels".
Relancer les discussions sur la fin de vie
La dissolution de l'Assemblée nationale, en juin, a mis un coup d'arrêt au projet de loi sur la fin de vie, dont l'examen en première lecture, débuté fin mai, s'est achevé sans aller jusqu'au vote. Cette réforme était l'une des plus emblématiques du second quinquennat d'Emmanuel Macron.
L'avenir de cette "grande loi de société" est pour le moment incertain, alors que la famille politique de Michel Barnier y est majoritairement opposée. Pour que le texte soit à nouveau examiné, il faudra qu'il soit réinscrit à l'ordre du jour à l'Assemblée nationale. L'Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD), qui a accueilli avec "beaucoup de circonspection" la nomination du Premier ministre, a demandé à Michel Barnier que "les discussions" sur la fin de vie reprennent "le plus rapidement possible".
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