Législative partielle : pourquoi le Doubs est une étape incontournable des politiques
La législative partielle des 1er et 8 février est la première élection en France depuis les attentats. Et les responsables politiques s'y pressent.
Florian Philippot, Laurent Wauquiez, Manuel Valls... Les habitants de la 4e circonscription du Doubs n'ont pas l'habitude de voir défiler autant de ténors sur leurs terres excentrées de l'est de la France. Vendredi 23 janvier, c'est au tour de Marine Le Pen d'arpenter le terrain. La raison de ce cortège de célébrités politiques est simple : le 1er et le 8 février se tiendra l'élection législative partielle déclenchée par la nomination de Pierre Moscovici à la Commission européenne de Bruxelles.
Premier scrutin depuis les attentats du mois de janvier, l'élection se retrouve au cœur des tactiques partisanes. UMP, FN et PS sont particulièrement attentifs au sort de cette circonscription qui va inaugurer une nouvelle séquence électorale avec les élections départementales en mars et les régionales à la fin de l'année. Francetv info vous explique pourquoi le Doubs va se retrouver au centre du jeu politique pendant quelques jours.
Le PS va tester le regain de popularité de l'exécutif
Tous les sondages montrent une remontée du couple exécutif dans les sondages, après sa gestion de la crise issue des attentats. François Hollande a regagné 21 points et Manuel Valls 17 dans le baromètre mensuel Ifop pour Paris Match*, publié lundi 19 janvier. Du coup, la majorité se prend à espérer des jours meilleurs dans les urnes, à commencer par l'élection dans le Doubs. Ce n'est sans doute pas un hasard si Manuel Valls a décidé la semaine dernière de se rendre au chevet du candidat socialiste, Frédéric Barbier, pour un meeting à Audincourt, le 27 janvier.
Il y a quelques semaines, le Parti socialiste, qui a perdu les treize élections législatives partielles organisées depuis 2012, ne s'imaginait même pas passer le premier tour de cette élection. Mais la nouvelle donne politique a redonné des espoirs au PS. "Oui, ça peut peut-être jouer sur la mobilisation de notre électorat (…), les gens que je rencontre sont très fiers de la manière dont le président et le Premier ministre ont géré la crise", avance avec prudence Frédéric Barbier, interrogé par francetv info.
Le candidat socialiste assure que les attentats ne changent pas sa stratégie de campagne, mais il continue à jouer la carte de l'unité et fustige "les piques" de Nicolas Sarkozy ou de Laurent Wauquiez : "Je pense que c'est une erreur, on a besoin de rester unis, rassemblés." Parti de loin, Frédéric Barbier "peut créer la surprise", assure Pierre Moscovici au JDD, avant d'ajouter : "Il n'y a pas de fatalité d'un duel FN-UMP." Politiquement, le PS peut laisser quelques plumes dans cette élection. S'il venait à perdre son siège, il fragiliserait un peu plus sa majorité et donnerait encore un peu plus de poids à l'Assemblée à ses partenaires de gauche.
L'UMP espère retrouver son rôle de premier opposant
Nicolas Sarkozy a raté l'occasion d'occuper le terrain politique à la suite des attentats. Condamné à se plier au principe de l'unité nationale, obligé de jouer des coudes lors de la marche républicaine, le président de l'UMP a tenté de réagir, le 21 janvier au journal de 20 heures de France 2. Plus offensif, il a tenté de reprendre la main sur le débat. L'élection législative dans le Doubs est le premier vrai test électoral de Nicolas Sarkozy depuis son retour à la présidence de l'UMP. Elle doit lui permettre de montrer que son parti est encore capable de mobiliser son électorat pour retrouver son siège, perdu en 2002.
Signe de l'importance de cette élection, les ténors de droite se mobilisent pour soutenir le candidat UMP Charles Demouge. Laurent Wauquiez était sur place le 20 janvier, Xavier Bertrand est attendu le 28 et Nicolas Sarkozy réfléchit à un déplacement entre les deux tours. La droite ne néglige pas l'importance symbolique de cette circonscription détenue jusque-là par Pierre Moscovici, l'ancien ministre de l'Economie socialiste.
Cette élection va donc permettre à la droite de définitivement conclure la séquence de l'unité nationale pour ouvrir à nouveau les hostilités. "C'est l'occasion pour les habitants de passer un message national pour dire au gouvernement : 'on n'est pas satisfaits de ce que vous avez fait'", a lancé Laurent Wauquiez lors de son déplacement. Le secrétaire général de l'UMP n'a pas non plus manqué de faire référence au contexte politique consécutif aux attentats, comme le note Le Monde, en évoquant notamment les "décisions à prendre pour défendre la République", "l’histoire de France que l’on doit apprendre à nos enfants", le "drapeau", la "Marseillaise", ou encore la "règle de vie en commun".
Le FN souhaite confirmer sa dynamique
Avec 24,85% des voix, le Front national est arrivé largement en tête des élections européennes l'an dernier et désire confirmer sa poussée avec cette législative partielle. Le parti de Marine Le Pen a vite repéré que ce siège était gagnable au regard de la progression de ses scores, 10 points au-dessus de la moyenne nationale du FN sur les trois dernières élections, comme le montre le Huffington Post. Conséquence, le FN met le paquet. Florian Philippot est venu soutenir, le 14 janvier, la candidate frontiste Sophie Montel. Et le 22 janvier, c'était au tour de Marine Le Pen de faire le déplacement dans le Doubs.
Le Front national considère cette circonscription comme un symbole. "C'est la circonscription de Pierre Moscovici, nouveau commissaire européen qui représente la politique que nous combattons, donc on aimerait que le PS fasse le plus bas score possible", confie Florian Philippot à francetv info. Le vice-président du FN joue en revanche la prudence sur une éventuelle victoire, en estimant que sa candidate ne part pas en position de favorite : "L'objectif, c'est d'abord d'arriver en tête du premier tour, ensuite l'enjeu sera de mobiliser les abstentionnistes."
Les attentats du mois de janvier ont accentué les enjeux pour le FN. Marine Le Pen a peiné dans sa communication autour des attaques, en décidant de défiler seule à Beaucaire, dans le Gard, loin de l'union nationale. Le FN espère donc montrer qu'il ne va pas payer cette dissension dans l'opinion. "On a refusé le garde-à-vous de l'unité nationale, et maintenant on entre dans le temps politique où il faut débattre des problèmes", réagit Florian Philippot, qui reste persuadé que sa formation a le plus de légitimité pour répondre aux enjeux de sécurité posés par les attentats. Le responsable frontiste pense que le FN peut reprendre la main sur le débat, "après la saturation médiatique opérée par l'exécutif".
Sophie Montel, 45 ans, appuie donc sa campagne autant sur les questions économiques que sur les problèmes de sécurité. "On n'a pas attendu les attentats pour avoir de vrais problèmes de délinquance, de communautarisme et de radicalisation. Dans ma circonscription, il y a des femmes voilées de la tête aux pieds et des jeunes qui partent faire le jihad", décrit la candidate à francetv info. A ceux qui parlent de récupération politique, Sophie Montel répond : "Quoi que l'on dise, on nous accuse toujours de vouloir faire de la récupération, mais c'est comme accuser le médecin de surfer sur la maladie, ça n'a pas de sens."
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