Report de charges, chômage partiel, éventuelles nationalisations... Comment le gouvernement va soutenir les entreprises face au coronavirus
Emmanuel Macron et Bruno Le Maire ont dévoilé une série de mesures pour venir en aide aux entreprises affectées par l'épidémie de Covid-19.
La France mène une "guerre" sanitaire contre le coronavirus, a assuré Emmanuel Macron lundi 16 mars. Mardi, Bruno Le Maire à son tour a annoncé une "guerre économique" contre l'épidémie. "Elle sera durable, elle sera violente, elle doit mobiliser toutes nos forces", a martelé le ministre de l'Economie sur RTL.
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Le PIB devrait reculer de 1% en 2020, loin de la croissance de 1,3% prévue par le gouvernement avant l'apparition du virus, selon la prévision "provisoire" donnée par le ministre. Pour aider les entreprises françaises, Bercy et l'Elysée ont dévoilé une série de mesures, que franceinfo vous résume.
En reportant ou en annulant des charges
Bruno Le Maire a annoncé 45 milliards d'euros de mobilisation "immédiate", mardi. L'essentiel de cette somme sera alloué au report des charges fiscales et sociales des entreprises durement touchées par le coronavirus. Cette mesure représentera 32 milliards d'euros sur le seul mois de mars. Les impôts indirects (TVA, etc.) ne sont pas concernés. "A la fin de la crise, nous ferons une évaluation des entreprises et si ce report doit se transformer en annulation pour certaines entreprises, au cas par cas, nous pouvons l'envisager", a précisé le ministre de l'Economie.
En revanche, "l'Etat ne prendra pas en charge les pertes d'exploitation des commerces", a prévenu Bruno Le Maire, expliquant que le gouvernement allait "voir comment les assureurs peuvent participer eux aussi, au titre de la solidarité au soutien aux entreprises".
Les crises sanitaires ne font pas partie des motifs d'indemnisation prévus par les assurances. "[Les assurances] ne font pas preuve de bonne volonté pour indemniser les entreprises de leurs brutales pertes d'exploitation. Pour sauver les PME, il faut que tout le monde y mette du sien, même si la notion de catastrophe sanitaire ne figure pas dans les contrats", estime François Asselin, président de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), interrogé par Ouest-France.
En prenant en charge le chômage partiel
Le gouvernement a largement ouvert ce dispositif, qui indemnise un salarié à hauteur de 70% du salaire brut et 84% du salaire net. L'Etat contribuait jusqu'ici au financement de cette mesure, à hauteur du smic. Il prendra désormais en charge 100% du chômage partiel, dans la limite de 4,5 smic.
Les entreprises ont un délai de 30 jours pour déposer une demande et le dispositif sera également ouvert aux personnes employées à domicile. Au total, cela coûtera 8,5 milliards d'euros sur deux mois, a indiqué Bruno Le Maire. "C'est un point-clé qui rompt avec des décennies d'économie française où, lorsqu'il y avait une crise économique, on se séparait des salariés, on faisait des licenciements et, du coup, on [redémarrait] plus difficilement l'économie puisqu'on avait perdu des compétences et des savoir-faire", a justifié le ministre.
La ministre du Travail avait dénombré "5 117 demandes d'entreprises [pour du chômage partiel] qui couvraient 80 000 salariés, pour un coût de 242 millions d'euros", à la date de jeudi soir. "Mais ça va aller bien au-delà, bien évidemment", avait estimé Muriel Pénicaud.
En mettant en place un fonds de solidarité
Doté de deux milliards d'euros environ sur un mois, il sera dédié aux très petites entreprises et aux travailleurs indépendants qui réalisent moins d'un million d'euros de chiffres d'affaires et qui ont perdu 70% de leur activité en mars 2020 par rapport à mars 2019. Ce "filet de sécurité", permettra le versement par la direction des finances publiques (DGFip) de 1 500 euros, de manière forfaitaire, à toutes les très petites entreprises qui rempliront ces conditions.
Cela bénéficiera par exemple à certains commerces, comme les restaurants et les bars, contraints de fermer par le gouvernement. Au total, Bercy estime que 600 000 entreprises seront concernées. "Il peut y avoir des entreprises dans une situation encore plus calamiteuse, pour lesquelles les 1 500 euros ne suffiront pas. Au cas par cas, nous verrons si nous pouvons aller au-delà", a précisé Bruno Le Maire.
En suspendant le paiement de certaines factures
Les petites entreprises, les très petites entreprises (TPE) et les micro-entrepreneurs en difficulté bénéficieront d'une suspension du paiement de leurs factures d'eau, de gaz, d'électricité et de loyers, a annoncé lundi Emmanuel Macron. Le gouvernement a d'ores et déjà "négocié avec EDF" cette disposition et est en train de le faire avec Engie pour le gaz, a indiqué Bruno Le Maire. Le ministre de l'Economie n'a pas précisé s'il négociait également avec les autres fournisseurs d'énergie, ce marché ayant été libéralisé. Pour les loyers, le ministre affirme négocier avec les centres commerciaux et appelle "à la solidarité de chacun".
En garantissant les prêts des entreprises
Comme annoncé lundi soir par Emmanuel Macron, l'Etat va garantir, à hauteur de 300 milliards d'euros, les prêts accordés par les banques aux entreprises touchées par le coronavirus. Cette garantie est ouverte à "tous les nouveaux prêts bancaires", a précisé Bruno Le Maire mardi. Cette mesure "a vocation à garantir le maintien de la trésorerie pour les entreprises", a-t-il ajouté, estimant qu'"aujourd'hui, les banques n'ont plus aucune raison de refuser quelque prêt que ce soit à quelque entreprise que ce soit".
"Notre priorité depuis le début, c'est de préserver la trésorerie des entreprises. Cette nouvelle enveloppe est plus massive et vient relayer le mécanisme de garantie de prêts pour les PME via la BPI, annoncé la semaine dernière", ajoute Bercy dans les colonnes des Echos.
En nationalisant si nécessaire
Bruno Le Maire n'a pas exclu que l'Etat soutienne directement certaines entreprises via une intervention à leur capital. "Je n'hésiterai pas à employer tous les moyens qui sont à ma disposition pour protéger les grandes entreprises françaises, a-t-il affirmé. Cela peut passer par de la capitalisation ou une prise de participation. Je peux même employer le terme de nationalisation si nécessaire."
Certains groupes français sont très durement secoués en Bourse et ont vu leur capitalisation fondre en quelques jours. C'est notamment le cas d'Air France-KLM, affectée comme l'ensemble du transport aérien par les restrictions de déplacement à l'échelle mondiale. Alors que l'Autorité des marchés financiers (AMF) a interdit pour 24 heures les ventes à découvert sur une centaine de titres, le gouvernement est prêt "à aller plus loin (...), jusqu'à l'interdiction d'un mois", a affirmé le ministre de l'Economie.
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