Carla Bruni-Sarkozy mise en examen : où en est l'enquête sur la fausse rétractation de Ziad Takieddine ?

En 2020, l'intermédiaire avait retiré son témoignage accusant Nicolas Sarkozy d'avoir financé sa campagne présidentielle de 2007 avec des fonds libyens. La justice enquête sur ce revirement, fait contre de l'argent selon Ziad Takieddine.
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Carla Bruni-Sarkozy et son époux, l'ancien président de la République Nicolas Sarkozy, à Paris, le 20 juin 2024. (BERTRAND GUAY / AFP)

Après Nicolas Sarkozy en octobre, Carla Bruni-Sarkozy a été mise en examen à son tour, mardi 9 juillet, dans l'enquête sur la rétractation de l'intermédiaire Ziad Takieddine, a appris franceinfo de source judiciaire. En 2020, l'homme d'affaires franco-libanais, qui accusait Nicolas Sarkozy d'avoir financé sa campagne présidentielle 2007 grâce à des fonds de l'ancien dictateur libyen Mouammar Kadhafi, était revenu sur son témoignage, dans une interview à BFMTV et Paris Match, puis dans une déposition transmise aux magistrats français.

Un revirement en échange duquel il s'était vu proposer "des millions d'euros", déclarait Ziad Takieddine, finalement revenu à son témoignage initial, dans l'émission "Complément d'enquête" de France 2 en avril. Interrogé sur la possibilité d'une implication de Nicolas Sarkozy ou son entourage dans ce marché, il répondait "oui, bien sûr".

Entre temps, une information judiciaire avait été ouverte, en mai 2021, sur les conditions de préparation de l'interview dans laquelle l'intermédiaire opérait ce faux revirement, avec en ligne de mire des soupçons de subornation de témoin. Franceinfo fait le point sur l'avancée de cette enquête, qui vaut à la chanteuse et épouse de l'ancien président une mise en examen.

Carla Bruni-Sarkozy est mise en examen

Carla Bruni-Sarkozy a déjà été entendue deux fois par les enquêteurs de l'Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales, comme témoin en juin 2023, puis comme suspecte, début mai. Selon les informations de l'AFP et de Mediapart, elle est soupçonnée d'avoir pris une ligne téléphonique cachée qui aurait servi au couple Sarkozy pour recevoir des messages de la patronne de l'agence de paparazzi Bestimage, Michèle Marchand, dite "Mimi", sur l'organisation de l'interview de Ziad Takieddine. La papesse de la presse people a été à la manœuvre pour décrocher le "scoop" de cette rétractation, comme l'a raconté la Cellule investigation de Radio France.

A l'issue d'un interrogatoire devant deux juges d'instruction financiers, Carla Bruni-Sarkozy a été mise en examen, mardi, pour "recel de subornation de témoin" et "participation à une association de malfaiteurs en vue de commettre l'infraction d'escroquerie au jugement en bande organisée". La chanteuse a en revanche été placée sous le statut, plus favorable, de témoin assisté s'agissant des soupçons d'association de malfaiteurs en vue de la corruption de personnels judiciaires étrangers au Liban, un autre pan de l'enquête sur les financements libyens de la campagne de 2007.

Cette décision, "prononcée dans les mêmes termes que celle concernant son mari (...), n'en est que la suite procédurale logique et n'est pas davantage fondée, ni juridiquement ni factuellement", ont réagi Paul Mallet et Benoît Martinez, les avocats de Carla Bruni-Sarkozy, qui est selon eux "déterminée à faire valoir ses droits et à contester cette décision infondée."

Une requête en cours de Nicolas Sarkozy

Nicolas Sarkozy a été mis en examen en octobre pour les mêmes infractions que son épouse. L'ancien chef de l'Etat est suspecté d'avoir avalisé les manœuvres pour obtenir la rétractation de Ziad Takieddine. Interrogé par deux juges d'instruction en octobre, il s'est présenté comme impliqué à tort dans cette affaire à cause d'une "petite bande" de "pieds nickelés" avides d'argent, rapporte "Complément d'enquête".

Lors de la mise en examen de leur client, ses avocats avaient fait valoir dans un communiqué que "la justice ne peut préserver à donner de la crédibilité aux déclarations de Ziad Takieddine lorsqu'elles accusaient Nicolas Sarkozy, et à l'inverse, les considérer manipulées lorsqu'elles le disculpent". Et d'ajouter : "Nicolas Sarkozy est fermement décidé à faire valoir ses droits, établir la vérité et défendre son honneur." Les avocats de l'ex-chef de l'Etat ont déposé en avril une requête pour faire annuler ces poursuites, puis une demande de dépaysement de l'enquête.

Le fonds de l'affaire des soupçons de financement illégal de sa campagne présidentielle de 2007 avec des fonds libyens doit être jugé en 2025. Nicolas Sarkozy est poursuivi pour "corruption passive", "association de malfaiteurs", "financement illégal de campagne électorale" et "recel de détournement de fonds publics libyens".

D'autres personnes sont poursuivies, dont Mimi Marchand

Une douzaine d'autres personnes sont mises en examen dans ce dossier. Parmi ces suspects figure notamment Mimi Marchand, la patronne de l'agence de paparazzis Bestimage et amie de Carla Bruni-Sarkozy, mise en examen en juin 2021 et placée sous contrôle judiciaire, notamment pour "subornation de témoin". 

D'autres mises en examen ont suivi, dont celle de l'intermédiaire Noël Dubus, déjà condamné pour escroquerie, le chef d'entreprise David Layani, le publicitaire Arnaud de la Villesbrunne, ancien directeur de l'agence Publicis, ou l'homme d'affaires Pierre Reynaud (mort en mai 2023). Toutes ces personnes sont soupçonnées, à des degrés d'implication divers, d'avoir œuvré au retrait par Ziad Takieddine de ses propos mettant en cause l'ancien chef de l'Etat, en échange d'une contrepartie.

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