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Le guide pour tout comprendre aux débats sur le budget 2024, présenté mercredi par le gouvernement

Article rédigé par Alice Galopin
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 11min
La Première ministre, Elisabeth Borne, le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, et son ministre délégué aux Comptes publics, Thomas Cazenave, seront en première ligne pour défendre le projet de budget 2024 du gouvernement. (ASTRID AMADIEU / FRANCEINFO)
Le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la Sécurité sociale seront examinés au Parlement à partir d'octobre.

C'est le départ d'un marathon budgétaire qui va durer tout l'automne. Le gouvernement présente en Conseil des ministres, mercredi 27 septembre, son projet de loi de finances (PLF) et son projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2024. 

>> Suivez en direct l'annonce du projet de budget 2024 par le gouvernement

Les deux textes seront ensuite transmis au Parlement, où la bataille politique doit durer jusqu'à décembre. Quelles sont les mesures défendues par l'exécutif ? La Première ministre prépare-t-elle une litanie de recours à l'article 49.3, comme l'année dernière ? Franceinfo vous livre les clés pour suivre les discussions.

Quels sont les différents textes budgétaires ?

Le projet de loi de finances (PLF), présenté chaque année à l'automne par le gouvernement, est le texte qui aboutit au budget de l'Etat pour l'année suivante. Il s'articule autour de trois grandes parties : l'"exposé général des motifs", qui résume les orientations du budget et les projections économiques du gouvernement ; les "conditions générales de l'équilibre financier", section qui détaille les recettes (notamment les impôts et les taxes) ; et le volet sur les "moyens des politiques publiques et dispositions spéciales", qui précise les dépenses des différents ministères.

A la même période de l'année, le gouvernement présente aussi son projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS). Il établit les prévisions de recettes de la Sécu et a pour but de maîtriser les dépenses sociales et de santé. Contrairement au PLF, "le PLFSS est davantage une loi d'orientation" et n'a pas de portée budgétaire contraignante, souligne Benjamin Morel, maître de conférences en droit public à l'université Paris Panthéon-Assas. Et pour cause, "une enveloppe budgétaire limitative (...) impliquerait de cesser les remboursements aux assurés une fois le plafond de l'enveloppe atteint", insiste le site de la Sécurité sociale.

En outre, le gouvernement peut revoir le budget en cours d'année, en raison d'une nouvelle conjoncture économique qui modifie l'équilibre financier, ou pour mettre en œuvre de nouvelles mesures. Dans ce cas, l'exécutif élabore un projet de loi de finances rectificative (PLFR). A l'été 2022, c'est ce véhicule législatif qui avait permis de financer une partie des mesures en faveur du pouvoir d'achat. En 2020, pas moins de quatre PLFR ont été présentés pour faire face aux dépenses liées à la crise sanitaire. De la même manière, le gouvernement peut présenter un projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale (PLFRSS). En début d'année, l'usage de ce texte pour faire passer la réforme des retraites avait fait l'objet de vifs débats, mais avait finalement été jugé conforme par le Conseil constitutionnel

Enfin, contrairement à ce que son intitulé suggère, le projet de loi de programmation des finances publiques (LPFP) n'est pas un texte budgétaire. Ce texte vise à définir la feuille de route de l'exécutif en matière de dépenses publiques pour le quinquennat. Le projet de LPFP pour la période 2023-2027 prévoit notamment de ramener le déficit sous 3% du produit intérieur brut (PIB) à l'horizon 2027. Après avoir échoué à le faire adopter par le Parlement en décembre dernier, il est à nouveau soumis aux députés en séance publique, à partir de mercredi.

Quels sont les grands axes du prochain budget ?

Après une année 2023 où le gouvernement attend 1% de croissance du PIB, le projet de budget repose sur une prévision de croissance de 1,4% en 2024, une perspective légèrement revue à la baisse, puisque Bercy tablait initialement sur 1,6%. Ce chiffrage est nettement plus optimiste que celui de la Banque de France qui anticipe 0,9% de croissance l'an prochain. En parallèle, l'exécutif maintient sa prévision de déficit, qui doit passer de 4,9% du PIB cette année à 4,4% l'année prochaine.

>> Inflation, transition écologique, taxe sur les autoroutes et les aéroports… Ce qu'il faut retenir du projet de budget pour 2024

Dans ce contexte, le ministre de l'Economie vise 16 milliards d'euros d'économies l'an prochain, dont 10 milliards d'euros liés à la fin progressive du bouclier tarifaire sur l'énergie. Dans la colonne des dépenses, l'exécutif se targue d'un budget teinté de vert, avec 7 milliards d'euros supplémentaires consacrés à des investissements dans la transition écologique. En parallèle, une nouvelle taxe sur les autoroutes et les grands aéroports sera également créée.

Pour amortir le choc de l'inflation pour les ménages, le barème d'imposition sur le revenu sera rehaussé de 4,8%, et les minima sociaux et les pensions de retraites seront revalorisées.

Du côté du PLFSS, "on ne va pas baisser les dépenses de santé", mais "il faut qu'elles augmentent moins vite", a concédé le ministre des Comptes publics, Thomas Cazenave au micro de Sud Radio le 20 septembre, pointant particulièrement le poids du remboursement des médicaments. Le texte comprend en outre des mesures pour renforcer le pouvoir de contrôle de l'Assurance maladie et des employeurs sur les arrêts maladie.

Comment va se dérouler l'examen au Parlement ?

Les textes budgétaires sont soumis à une procédure parlementaire particulière. Une fois adopté en Conseil des ministres, le projet de loi de finances doit être déposé à l'Assemblée nationale au plus tard le premier mardi d'octobre. Le Parlement dispose ensuite de 70 jours pour examiner le projet de loi, l'amender et le voter.

Dans le détail, l'examen débute systématiquement à l'Assemblée nationale, qui a 40 jours pour adopter le texte en première lecture. La version du PLF adoptée dans l'hémicycle est ensuite transmise en première lecture au Sénat. Si les députés ne parviennent pas à statuer sur le texte dans le délai imparti, la chambre haute examine le texte initial du projet de loi, éventuellement modifié par les amendements votés par les députés et retenus par le gouvernement. "Dans cette dernière hypothèse, le Sénat dispose de 15 jours pour discuter et adopter le texte, mais de 20 jours si la procédure suit son déroulement normal", résume le site Vie publique. La procédure d'adoption du PLFSS suit une logique similaire : le projet de loi doit être déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale au plus tard le 15 octobre, et le Parlement a ensuite 50 jours pour se prononcer. 

Si nécessaire, à l'issue de la première lecture du PLF ou du PLFSS par les deux chambres du Parlement, le gouvernement peut convoquer une  commission mixte paritaire (CMP), composée de sept députés et sept sénateurs, chargée d'élaborer une version commune du texte. Si elle se met d'accord, l'exécutif peut soumettre cette nouvelle version pour approbation à chacune des deux chambres. En cas d'échec de la CMP, après une nouvelle lecture à l'Assemblée et au Sénat, le gouvernement peut demander aux députés de statuer définitivement. Si le texte n'est pas adopté dans le calendrier fixé, alors la Constititution prévoit que les dispositions des textes budgétaires puissent être mises en oeuvre par voie d'ordonnance. " Cela permet de payer les fonctionnaires et de prélever les impôts, jusqu'à ce qu'un nouveau texte soit voté", éclaire Benjamin Morel.

Le recours à l'article 49.3 est-il envisagé ?

Traditionnellement, "les oppositions peuvent voter certaines parties du budget, adopter certains amendements, mais elles ne voteront pas le budget" dans son intégralité, rappelle Benjamin Morel. "On n'ira en aucun cas voter le budget, on n'est pas dans la majorité", a tranché sur franceinfo Olivier Marleix, chef de file des 62 députés Les Républicains. A gauche, l'élu de La France insoumise Eric Coquerel a dénoncé, lors d'une conférence de presse début septembre, un PLF "rempli de contradictions". "Le gouvernement dit qu'investir dans la transition écologique de manière massive est nécessaire, mais, d'un autre côté, on met comme objectif principal la baisse du déficit", pointe le président de la commission des Finances de l'Assemblée. La députée socialiste Valérie Rabault a, quant à elle, évoqué la préparation d'un "contre-budget" . Des positions qui ne surprennent pas Benjamin Morel :

"D'un point de vue politique, si vous voulez réellement être considéré comme un parti d'opposition, vous ne pouvez pas voter le budget."

Benjamin Morel, maître de conférences en droit public

à franceinfo

En l'absence de majorité absolue à l'Assemblée nationale, le gouvernement devra donc probablement avoir recours à l'article 49.3 pour faire adopter le PLF et le PLFSS. Cet outil constitutionnel, dont l'utilisation est restreinte à un seul texte par session parlementaire, peut en revanche être dégainé sans limite sur les textes budgétaires. Ainsi, à l'automne dernier, Elisabeth Borne avait engagé à dix reprises sa responsabilité devant les députés sur le budget 2023 et le PLFSS. "On aura à recourir, certainement, cet automne, à des 49.3, parce que notre pays a besoin d'un budget", a reconnu début septembre la Première ministre.

A défaut d'un soutien des oppositions sur le vote du budget, le gouvernement espère toutefois trouver des compromis sur certaines mesures. "Ce que je souhaiterais, c'est qu'au-delà de nos divergences, on puisse, sur quelques sujets, travailler ensemble", a avancé le ministre délégué aux Comptes publics, Thomas Cazenave, sur franceinfo, citant notamment la "lutte contre la fraude" ou le "financement de la transition écologique". "J'ai indiqué que j'étais d'accord pour qu'on avance sur ces sujets, qu'on pourra mettre [dans le PLF] par voie d'amendement", a-t-il encore déclaré le 20 septembre.

Le gouvernement se prépare aussi à utiliser le 49.3 pour faire adopter le projet de loi de programmation des finances publiques. Or, "la LPFP n'est pas considérée comme un texte budgétaire, donc il n'y a pas de 49.3 'gratuit'", rappelle Benjamin Morel. La convocation du Parlement en session extraordinaire pour examiner ce texte laisserait toutefois à Elisabeth Borne la possibilité de recourir à cet article tout en conservant le droit de l'utiliser à nouveau durant la session ordinaire, sur un autre projet de loi.

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