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Remaniement : déserts médicaux, urgences, fin de vie... Les chantiers qui attendent Aurélien Rousseau au ministère de la Santé

L'ex-directeur de cabinet de la Première ministre a rejoint le gouvernement d'Elisabeth Borne jeudi soir.
Article rédigé par Florence Morel
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 6min
Aurélien Rousseau, le ministre de la Santé et de la Prévention, à Paris, le 21 juillet 2023. (BERTRAND GUAY / AFP)

La passation de pouvoir a eu lieu vendredi 21 juillet, avenue de Ségur. François Braun a passé les clefs de "son" ministère de la Santé à Aurélien Rousseau. Pour l'ancien directeur de l'agence régionale de santé (ARS) d'Ile-de-France, les chantiers sont nombreux. "Le monde de la santé, depuis plusieurs années maintenant, traverse des crises au-delà du Covid", a reconnu lors de son discours l'ex-bras droit d'Elisabeth Borne.

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"La feuille de route est claire", a pour sa part assuré le porte-parole du gouvernement (et ancien ministre de la Santé), Olivier Véran, sur le plateau de France 2 vendredi. Franceinfo revient sur les défis auxquels s'attaque le nouveau ministre.

1 Résoudre la crise de l'hôpital, aux urgences et dans les maternités

La crise de vocation qui touche l'hôpital public figure en haut de la pile des dossiers. "Il y a une dégradation qu'on n'a jamais vue sur l'offre de soins", dénonçait, dimanche 16 juillet, l'urgentiste Patrick Pelloux, sur franceinfo. Des dizaines de services sont contraints de réguler l'afflux de patients arrivant aux urgences. Des maternités ferment leur plateau technique, faute de personnel, notamment en Seine-Saint-Denis, en Dordogne, à Sedan (Ardennes) et à Guingamp (Côtes-d'Armor). 

"On ne pourra pas continuer comme ça longtemps", a alerté le président de la Fédération hospitalière de France (FHF), Arnaud Robinet, vendredi sur franceinfo. "Il va falloir des mesures nettes, claires et précises que nous demandons depuis plusieurs mois sur la revalorisation des gardes, des astreintes. Il nous faut un vrai plan stratégique en termes de ressources humaines, d'attractivité et de fidélisation", a détaillé le maire (Horizons) de Reims.

Le Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI) va dans le même sens. Il a appelé vendredi sur Twitter à un "plan Marshall pour sauver l'hôpital". Face aux "60 000 postes infirmiers vacants et 10% des soignants en maladie, épuisement, dépression, burn-out, il y a urgence à agir".

2Améliorer l'accès aux soins et lutter contre les déserts médicaux

"On ne peut pas, en quelques mois ou en un an, transformer l'accès aux soins", a reconnu Olivier Véran sur France 2. Ill voit en Aurélien Rousseau "un acteur de terrain" qui "aura à cœur la réduction des inégalités de santé, dont on a vu pendant la crise qu'elles entraînaient des dégâts".

Emmanuel Macron a promis, lors de ses vœux formulés au mois de janvier, que les 600 000 personnes souffrant d'affection longue durée (ALD) trouveraient un médecin traitant "d'ici à la fin de l'année". Mais la route paraît encore longue : François Braun précisait sur Public Sénat le 10 juillet que seuls 53 000 de ces patients avaient "trouvé un médecin traitant".

Le nouveau locataire de l'avenue de Ségur devra résoudre cette problématique tout en renouant le dialogue avec les médecins libéraux, échaudés par les décisions prises par son prédécesseur. Ces derniers ont impulsé plusieurs mouvements de grève depuis décembre 2022, demandant une revalorisation de la consultation allant de 30 à 50 euros. Finalement, faute de consensus, c'est une haute fonctionnaire qui avait tranché à l'issue des discussions, revalorisant la consultation de 1,50 euro.

3 Rédiger un projet de loi sur la fin de vie

Jusqu'à présent, le projet de loi sur la fin de vie sur lequel planche le gouvernement était essentiellement porté par la ministre déléguée aux Professions de santé, Agnès Firmin-Le Bodo, qui reste en poste. Dans son discours de passation de pouvoir, Aurélien Rousseau a affirmé "que nous devrons nous confronter à des questions lourdes, éthiques (...) notamment dans le cadre de la loi relative à la fin de vie (...) Des progrès, il y en a encore à conquérir, avec les patients, pour les patients".

Toutefois, il n'a pas donné plus de précisions quant au calendrier, alors que la convention citoyenne sur la fin de vie a livré ses conclusions sur le sujet début avril. Le président de la République avait annoncé dans la foulée sa volonté d'aboutir à un texte "d'ici à la fin de l'été".

4 Donner un nouveau souffle au secteur de la psychiatrie

Autre urgence : la psychiatrie, secteur délaissé selon les soignants depuis des années, encore plus abîmé depuis la crise sanitaire. L'attaque au couteau qui a coûté la vie à une infirmière au CHU de Reims (Marne), le 24 mai, a ravivé la colère du personnel qui dénonce un manque de moyens. Quatre syndicats ont notamment appelé en novembre à la grève pour dénoncer les fermetures de lits. "Nous nous mobilisons depuis 2003 pour alerter sur cette crise très profonde de la psychiatrie, qui se perpétue depuis trente ans", a expliqué à franceinfo Patrick Chemla, membre du conseil national de l'Union syndicale de la psychiatrie.

Par ailleurs, la pénurie de pédopsychiatres reste criante, alors que de plus en plus d'adolescents ressentent le besoin de consulter un spécialiste. "En ville, plus d'une dizaine de départements sont totalement dépourvus de pédopsychiatres libéraux", avait souligné, en novembre 2021, la Défenseure des droits, Claire Hédon.

5Eviter de nouvelles pénuries de médicaments cet automne

Enfin, le nouveau ministre devra s'atteler à prévenir de nouvelles pénuries de médicaments. Cet hiver, le nombre de signalements de ruptures de stock a atteint un pic inédit de plus de 3 700 en 2022 (il était de 700 en 2018), selon un rapport du Sénat publié le 6 juilletEn cause : la triple épidémie de Covid-19, de grippe et de bronchiolite de cet hiver, conjuguée à des difficultés d'approvisionnement.

C'est pour y répondre que le président de la République a ainsi annoncé, le 13 juin, que la production de 25 molécules sera "relocalisée ou augmentée significativement sur le territoire national (...) dans les prochaines semaines" sans donner plus de détails.

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